Tension dans le Golfe après des "actes de sabotage" contre quatre navires

GLOBE ÉCHOS | 13/05/19 16:52

Quatre navires ont été la cible de mystérieux "actes de sabotage" au large des Emirats, selon Ryad et Abou Dhabi, provoquant une montée des tensions dans le Golfe au moment où le secrétaire d'Etat américain Mike Pompeo discute de l'Iran à Bruxelles.

"Nous sommes très inquiets du risque qu'un conflit se produise par accident", a réagi le ministre britannique des Affaires étrangères, Jeremy Hunt, avant de rencontrer ses homologues européens et M. Pompeo.

Tôt lundi, les autorités d'Arabie saoudite, alliées de Washington, ont rapporté des "actes de sabotage" ayant endommagé la veille deux navires saoudiens au large des Emirats, autre pays proche des Etats-Unis qui viennent de renforcer leur présence militaire dans le Golfe dans le contexte iranien.

"Deux pétroliers saoudiens ont fait l'objet d'actes de sabotage dans la zone économique exclusive (ZEE) des Emirats arabes unis, au large des côtes de l'émirat de Fujairah, alors qu'ils étaient sur le point de pénétrer dans le Golfe d'Arabie", a dit le ministre de l'Energie Khalid Al-Falih.

Dimanche, après avoir démenti un incident dans un port, les Emirats avaient finalement fait état d'"actes de sabotage" contre quatre navires commerciaux de différentes nationalités à l'est de l'émirat de Fujairah, sans identifier les auteurs mais en qualifiant l'évènement de "grave".

Un responsable gouvernemental émirati a précisé lundi que les bateaux en question étaient deux tankers saoudiens, Al Marzoqah et Amjad, un norvégien, Andrea Victory, et un cargo émirati, A. Michel.

Une photo, fournie par le gouvernement émirati, montré la coque endommagée de l’Andrea Victory.

A Téhéran, les autorités iraniennes ont appelé à l'ouverture d'une enquête.

"Ces incidents en mer d'Oman sont alarmants et regrettables", a dit Abbas Moussavi, porte-parole du ministère des Affaires étrangères, en mettant en garde contre "l'aventurisme (d'acteurs) étrangers" pour perturber la navigation maritime dans la région.

"L'enquête sera menée de manière professionnelle", a assuré le ministre d'Etat émirati aux Affaires étrangères, Anwar Gargash. "Les faits seront indiqués clairement", a-t-il promis en soulignant qu'Abou Dhabi avait déjà "sa propre lecture et ses propres conclusions".

Toutes les places boursières du Golfe étaient en baisse lundi.

- "Acte criminel" -

Le ministre saoudien de l'Energie a dit que les actions contre les pétroliers saoudiens n'avaient causé ni victime ni marée noire, mais provoqué "des dégâts significatifs aux structures des deux navires".

Un des deux navires était en route pour être chargé de pétrole au terminal saoudien de Ras Tanura en vue d'une livraison à des clients américains, a-t-il précisé.

Ultérieurement, le ministère saoudien des Affaires étrangères a "condamné" un "acte criminel" qui constitue une "sérieuse menace" à la navigation maritime et a "une incidence néfaste sur la paix et la sécurité".

Comme Abou Dhabi, Ryad n'a désigné aucun responsable. Les deux pays n'ont pas non plus précisé la nature des "actes de sabotage".

Dès dimanche, le gouvernement des Emirats a appelé la communauté internationale à "prendre ses responsabilités pour empêcher que de telles actions soient commises par des parties cherchant à porter atteinte à la sécurité de la navigation".

Le port de Fujairah est le seul terminal des Emirats arabes unis situé sur la côte de la mer d'Arabie qui contourne le détroit d'Ormuz, par où passent la plupart des exportations de pétrole du Golfe.

L'Iran a, à plusieurs reprises, menacé de fermer ce détroit stratégique, crucial pour la navigation mondiale et le commerce pétrolier, en cas de confrontation avec les Etats-Unis.

L'annonce de ces incidents par deux proches alliés de Washington intervient dans un contexte de regain de tension entre les Etats-Unis et l'Iran après le renforcement des sanctions américaines contre Téhéran, qui a pour sa part suspendu certains de ses engagements nucléaires.

- Pompeo à Bruxelles -

Vendredi, le Pentagone a annoncé l'envoi dans la région d'un navire de guerre transportant des véhicules, notamment amphibies, et d'une batterie de missiles Patriot, s'ajoutant au déploiement d'un porte-avions et de bombardiers B-52.

Dimanche soir, le département d'Etat a annoncé que le chef de la diplomatie américaine Mike Pompeo avait décidé de se rendre lundi à Bruxelles pour discuter de "questions urgentes", et notamment de l'Iran, avec ses homologues européens.

M. Pompeo avait déjà annulé ces derniers jours des déplacements à Berlin et au Groenland pour se consacrer à ce dossier iranien.

L'analyste Karen Young, de l'American Enterprise Institute, a invité à la prudence face à "l'engrenage des provocations" accompagnées de possibles "mauvaises interprétations".

Lundi, le secrétaire général du Conseil de coopération du Golfe (CCG), Abdullatif al-Zayani, ainsi que l'Egypte, la Jordanie et Bahreïn --trois alliés de Ryad et d'Abou Dhabi--, ont condamné les incidents.

"C'est un développement dangereux et une escalade caractérisant des intentions diaboliques", a dit M. Zayani.

Le petit émirat de Fujairah dispose de deux terminaux pétroliers et d'un oléoduc qui fournit du pétrole en provenance d'Abou Dhabi, où se trouve la majorité des réserves pétrolières des Emirats.

Cet oléoduc d'une longueur de 406 km permet d'acheminer 600.000 barils de brut par jour et surtout d'éviter le détroit d'Ormuz. Le port de Fujairah a une grosse capacité de stockage (70 millions de barils).

Ces tensions dans la région interviennent en outre alors qu'une guerre se poursuit au Yémen, où Saoudiens et Iraniens soutiennent des factions rivales.

 

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